Le marché des produits laitiers au Japon, une consommation en hausse constante
Le Japon, pays fortement urbanisé et comptant 127 millions de consommateurs, se hisse au rang de troisième économie mondiale avec un PIB par habitant de 42 390 USD (Banque Mondiale). Sa population, relativement âgée (35% de 65 ans et +), se caractérise entre autres par une consommation saine et équilibrée à laquelle elle alloue un budget important. En termes d’alimentation, les notions de santé et de plaisir sont primordiales pour les consommateurs japonais.
Au sein de cette population, l’occidentalisation du mode de vie alimentaire s’impose progressivement, avec notamment une hausse de la consommation de produits laitiers et une offre de plus en plus diversifiée et concurrentielle.
D’après le ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche japonais, la consommation japonaise de fromage est évaluée à 360 704 tonnes en 2020, soit la 6ème année consécutive ou le record historique est battu. En détail, les Japonais consomment en moyenne par habitant 31L de lait, 600g de beurre et 2,7kg de fromage par an.
Le lait de consommation reste le produit laitier le plus consommé au Japon (~70% de la consommation), viennent ensuite le yoghourt (26%), le fromage (3%) et le beurre (1%). Le marché du lait à boire est toutefois stagnant et monopolisé par des fabricants locaux. Le fromage et le beurre sont les produits laitiers qui offrent les plus belles perspectives d’évolution, avec une consommation qui progresse d’année en année.
Un pays qui reste fortement dépendant des importations de produits laitiers
Parallèlement à cette hausse de consommation de produits laitiers, le Japon reste historiquement dépendant de ses importations de ressources agroalimentaires et notamment en produits laitiers. Les importations couvrent ainsi 60% des besoins alimentaires du pays sur une base calorique et le taux d’autosuffisance pour les produits laitiers est évalué à seulement 27%.
L’écosystème productif au Japon est principalement composé de fermes familiales dans la région d’Hokkaido, même si des fusions d’exploitation émergent depuis quelques années afin de créer des coopératives. La production de lait était en baisse régulière jusqu’à récemment, principalement du fait d’une diminution du cheptel et des aléas climatiques. Toutefois, depuis 2020 les efforts entrepris par les pouvoirs publics ont amené à un rebond significatif de la production laitière japonaise.
Au niveau des importations, la France est un fournisseur relativement important pour le Japon puisque classé en 6ème position que ce soit en valeur et en volume, derrière la Nouvelle Zélande (22,6% de PdM), les Etats-Unis (16,4%), l’Australie (15,1%), les Pays-Bas (9,8%) et l’Allemagne (8,1%).
En 2021, le Japon était quant à lui le 15ème client de la France en valeur (~93M EUR d’exportations vs ~89 M EUR en 2020) et le 21ème en volume (~19 000 tonnes soit un niveau similaire à l’année 2020).
La France y exporte principalement du fromage (HS code 0406) qui compte pour plus de 70% du total export en valeur. L’autre grand poste d’exportation est représenté par le beurre (HS code 0405) avec un peu plus de 13% de l’export de produits laitiers. Viennent ensuite des ingrédients laitiers comme la caséine (4,5%) ou le lactosérum (3,3%).
La France est notamment le 2ème fournisseur de beurre du Japon (23% PdM en 2021), derrière la Nouvelle-Zélande, et le 8ème fournisseur de fromage (6,73% PdM) derrière un top 3 composé de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et des Etats-Unis.
Depuis plusieurs années la France gagne peu à peu des PdM, avec 6,70% des importations totales de produits laitiers du Japon en 2021. Les exportations françaises de produits laitiers sont globalement positionnées sur du haut de gamme avec des produits en général plus onéreux que ceux proposés par les nations concurrentes.
Des opportunités à exploiter pour la France tout en prêtant attention à certains points de vigilance
L’Accord de partenariat économique (APE) UE-Japon, entré en vigueur le 1er février 2019 afin d’alléger les contraintes en matière d’exportation de produits vers le Japon, représente une opportunité à exploiter. L’ALE UE-Japon doit ainsi permettre de développer l’export des entreprises françaises vers le Japon, notamment sur le beurre et le fromage, au même titre que nos voisins européens.
Un grand nombre de lignes douanières font ainsi l’objet de réduction des tarifs douaniers voire dans certains cas de suppressions. Certaines catégories sont assorties d’une condition de quota annuelle dont la quantité est déterminée sur la base d’un calendrier préétabli. C’est notamment le cas du fromage dont le quota était fixé à 21 800 tonnes en 2021 et sera de 22 500 tonnes pour l’année 2022.
Les produits laitiers français sont très appréciés au Japon et plutôt positionnés sur du haut de gamme, avec une image d’excellence au niveau sanitaire et qualité. Ainsi les fromages de spécialités et les produits laitiers avec des appellations AOP et IGP sont perçus comme un gage de qualité, ce qui en fait un réel argument de vente. Le beurre Echiré, utilisé notamment dans la confection de pâtisseries et viennoiseries premium, rencontre quant à lui un succès notable auprès des « foodies » Japonais.
Les accords vins et fromages représentent également un atout à faire valoir sur le marché japonais, notamment car le vin français a le vent en poupe (la France est le 2ème fournisseur en volume et 1er fournisseur en valeur du Japon) et que la consommation de fromage est en progression constante même si ce produit n’est pas encore profondément ancré dans les habitudes alimentaires locales.
Enfin, suite de la crise sanitaire des tendances semblent émerger en ce qui concerne la consommation de produits laitiers. Dans le cadre de l’enquête de la Japan Dairy Association (JDA), menée en janvier 2021, sur les tendances alimentaires concernant le lait et les produits laitiers au Japon, le graphique ci-dessous synthétise les réponses à la question « Votre envie de consommer des produits laitiers s’est-elle renforcée depuis avril – 2020 - ? ».
Les deux tranches d’âge (15-19 et 65 ans +) représentent les plus fortes progressions concernant l’envie de consommer davantage de produits laitiers, et notamment du fromage avec +17,4% pour les 15-19 ans et + 19.1% pour les plus de 65 ans entre avril 2020 et janvier 2021.
L’étude révèle également que les jeunes sont plus sensibles aux événements liés au produits laitiers depuis la crise sanitaire.
Légende :
- Encadré jaune : pourcentage d’évolution de la consommation de fromage
- Courbe bleu ciel : les 15-19 ans
- Courbe verte : les 65 ans et +.
En plus de l’émergence d’une cible plus jeune révélée par l’étude de la JDA et avec l’apparition des influenceurs sur les réseaux sociaux, auxquels cette cible est particulièrement sensible, le segment jeune de la population japonaise peut être envisagée comme de nouveaux consommateurs potentiels. En effet les jeunes sont susceptibles de découvrir de nouvelles pratiques de consommation autres que celles correspondants aux fromages fondus (les plus populaires dans le pays actuellement).
Malgré ces opportunités, certains points de vigilance sont à prendre en compte dans la pénétration du marché japonais :
Premièrement la concurrence existante à plusieurs niveaux :
- La concurrence européenne avec notamment les Pays-Bas, l’Allemagne ou encore l’Italie
- La concurrence de pays tiers avec l’Océanie (Australie et Nouvelle-Zélande) et les Etats-Unis notamment du fait d’une proximité géographique avec le Japon qui rend les relations commerciales plus accessibles. Les exportations des deux pays océaniens sur le segment du fromage restent principalement orientées sur de l’export de masse avec des débouchés dans la RHD et les IAA.
En termes de tendances de consommation, les fromages français peuvent être considérés comme trop forts en goût et en odorat par les consommateurs japonais, qui en général préfèrent des produits dits plus neutres en comparaison avec nos habitudes de consommation occidentales.
De plus, les normes sanitaires et phytosanitaires sont particulièrement exigeantes sur place. Dès lors qu’un produit est interdit à l’import il sera par la suite très difficile d’obtenir à nouveau une autorisation. Il faut également garder en tête que les analyses et contrôles sanitaires sont très fréquents à l’entrée sur le territoire japonais.
Enfin, le packaging et l’innovation sont des critères importants à ne pas négliger dans les choix du consommateur. Sur ces aspects il est conseiller de passer par des opérateurs japonais. En effet le niveau d’attente de la population est tel qu’un marketing adapté à la cible nécessite quasi systématiquement une collaboration locale.
Exporter au Japon nécessite ainsi une excellente préparation et une bonne connaissance du marché.
Quelles prévisions pour 2022 ?
Avec la hausse de la production laitière locale en 2021 et une collecte qui devrait augmenter de 1% localement en 2022 selon l’USDA, les importations de produits laitiers pourraient être moins dynamiques cette année. Les besoins semblent actuellement limités du fait de restrictions dans le secteur HoReCa, liée à l’épidémie de Covid-19, et de stocks jugés élevés à ce jour.
Toutefois, malgré une diminution de 3,16% des importations de fromage du Japon en 2021, les importations en provenance de la France ont augmenté de 6,91%. Notamment grâce à une forte consommation à domicile qui s’est largement répandue. La dégustation de plateaux de fromages, entre autres, s’est démocratisée en milieu urbain avec des fromages français particulièrement plébiscités. Une tendance de consommation à domicile qui pourrait se poursuivre en 2022.
Enfin, une réouverture progressive du secteur HoReCa, courant de l’année, pourrait amener à une hausse de la consommation de produits laitiers, même s’il faut toutefois rester prudent sur l’évolution de la situation sanitaire.
Retrouvez les études Business France & Sopexa sur le Japon ci-dessous: